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Formica, groupe exsectoides

Ce groupe comprend deux espèces exclusives à la région Néarctique, mais traditionnellement associées à l’espèce Formica exsecta du sous-genre paléarctique Coptoformica (Creighton 1950, Seifert 2000). On peut supposer que la dérive des continents a généré une séparation et une évolution distincte de leurs ancêtres respectifs. Les caractéristiques morphologiques, écologiques et biogéographiques actuelles justifient, alors, le détachement de ce sous-genre de la région Paléarctique, et la création d’un nouveau nom de groupe pour la région Néarctique : Groupe exsectoides au lieu de Groupe exsecta.

L’espèce européenne F. exsecta se distingue morphologiquement des espèces néarctiques en particulier par : une zone centrale très profonde au centre de la rondeur postérieure de la tête; un clypéus convexe sans crête médiane et avec une marge antérieure convexe; des carènes frontales parallèles, après la courbe de départ à la base du triangle frontal, leur longueur égale faiblement la largeur maximale du front; le front et le vertex soulevés au centre de la tête; un mésosome nettement plus trapu et doté d’un promésonotum bulbeux; un pétiole ayant une marge dorsale caractérisée par une concavité, en général large et profonde; absence de poils longs sur la face ventrale de la tête, le prosternum et les procoxas; une pubescense plus longue, en particulier sur la tête, en partie soulevée sur toutes les pattes. Description basée sur des spécimens types du Antweb.org  2023 et Seifert 2000 (fig. A1 et A2). Une étude génétique comparative approfondie, comme celle de Schär et al. (2018), s’impose donc pour déterminer leurs liens phylogénétiques.

Diagnose. Espèces bicolores. Corps : grande taille, 3,5 à 7,5 mm; surface mate; coloration de base rouge et noir; variations sur la moitié postérieure de la tête et sur le pronotum; gastre noir luisant, parfois noir brunâtre; pilosité et pubescence courtes, limitées et éparses. Tête en vue frontale parfaite : marges latérales faiblement convexes; marge postérieure bien concave et large, suivie d’angles latéraux courtement arrondis; la rondeur postérieure de la tête affiche une zone centrale légèrement profonde. Parfois un à trois microdenticules à l’extrémité distale de la marge basale des mandibules. Yeux composés sans micropoils; diamètre de petite taille, très inférieur à la longueur des joues, jouxtant les marges latérales de la tête. Palpes maxillaires formant deux chaînes courtes de six articles; au repos et allongées sur la face ventrale de la tête, l’extrémité apicale de ces deux chaînes est nettement loin du cou (se perçoit aussi sans être allongées). Clypéus : marge antérieure anguleuse, aire médiane soulevée et affichant une carène centrale. Scapes s’élargissant faiblement de la base à l’apex. Front et vertex intégrés à la convexité dorsale de la tête. Carènes frontales faiblement convexes et divergentes depuis leur base, nettement plus courtes que la largeur maximale du front. Mésosome plutôt élancé en vue latérale; marge dorsale du promésonotum formant un plateau oblique et aplati. Propodéum en vue latérale : faces dorsale et postérieure formant une convexité continue, parfois bombée. Pétiole en vue postérieure : marge dorsale convexe, sans échancrure médiane; en vue latérale, moitié dorsale mince. Gastre : pilosité dorsale et pubescence peu abondantes. Photos 1 à 8, plus loin.

Bioécologie. Les deux espèces de ce groupe sont des parasites sociaux temporaires des espèces du Groupe subaenescens. Une gyne fécondée va envahir une colonie choisie et éliminer la reine pour prendre le contrôle de la colonie dont les individus prendront soin de ses futurs rejetons. Progressivement, la population de la colonie hôte s’éteint et le nid abritera uniquement des rejetons de la reine parasite. Par la suite, le nid sera développé pour loger une population comptant jusqu’à environ 2000 ouvrières. Avec le temps, le recrutement de nouvelles gynes (polygynie) favorisera une forte polydomie permettant d’héberger des centaines de milliers d’ouvrières. Elles vivent dans des milieux arborés avec des zones ouvertes ou des milieux entièrement ouverts.  AntWiki.org 2023, Ellison et al. 2012.

spécimen type de Formica exsecta spécimen type de Formica exsecta

CLÉ DES ESPÈCES 
SELON LES ERGATES




Formica exsectoides Forel 1886

Diagnose. Additions aux caractères de la clé. Corps : taille de 4,5 à 8 mm, à surface terne, sauf gastre luisant. Coloration : tête, mésosome, pétiole et appendices rouge orangé à brunâtres; variations : plage marron foncé couvrant la zone du triangle ocellaire (vertex) et sur les angles postérieurs de la tête, tache dorsale sombre sur le pronotum, gastre noir. Pétiole : marge dorsale convexe ou anguloconvexe, parfois avec une petite pointe centrale. Parfois un à trois micropoils dans la zone du triangle ocellaire. Rarement présence de un à trois poils très courts sur le promésonotum, le propodéum et la marge dorsale du pétiole. Pubescence peu visible, courte et peu dense sur le mésosome, nettement plus visible et distancée sur la tête, sur le dos du gastre (tergum) et sur les pattes (visible avec un grossiment de 50x).

Bioécologie. En général, F. exsectoides prend le contrôle de petites colonies de Formica subsericea et de F. subaenescens (Groupe subaenescens) en tuant la reine, générant une colonie mixte temporaire d’environ 2000 individus. Cette colonie pionnière pourra se développer principalement en recrutant de nouvelles gynes fécondées (polygynie) et par bourgeonnement. La production de centaines de milliers d’ouvrières entraînera la construction de dizaines de nouveaux nids interconnectés (polydomie). Les ouvrières deviennent très agressives si on les dérange dans leur nid et lorsqu’elles butinent hors de leur nid. Une caractéristique particulière : elles détruisent les plantes (herbes et arbustes) qui entourent leur nid (Smith 1947).

Cette espèce habite à l’orée des arbustaies et des boisés ouverts, des prairies mésiques, parfois dans des bleuetières (nuisance). Elle construit ses nids dans des sols sablonneux ou graveleux, surmontés d’un monticule couvert de débris végétaux et minéraux; souvent de forme circulaire, les nids peuvent atteindre entre un et deux mètres de hauteur et un diamètre encore plus grand; parfois sous roche ou dans des touffes d’herbes. Omnivore, Formica exsectoides se nourrit surtout de petits arthropodes, de miellat (pucerons, cochenilles, membracides), de la sève et du nectar de plantes. AntWiki.org 2023, Ellison et al. 2012, Haviland 1947, Smith 1947.

Répartition. Sud du Québec. Son territoire demeure encore peu connu. Présence sporadique. Châteauguay (L’Artifice), Montréal, Rigaud, Saguenay.

Répartition néarctique. Sud du Canada : de la Nouvelle-Écosse jusqu’au Manitoba. États-Unis : États du Nord-Est jusqu’au Colorado. Centre nord du Mexique. Andrews 1926, Ellison et al. 2012, GBIF.org 2023.

Formica exsectoides Formica exsectoides
Formica exsectoides Formica exsectoides

Formica ulkei Emery 1893

Diagnose. Additions aux caractères de la clé. Corps : taille  de 4,5 à 7,0 mm, à surface terne, sauf tête et gastre un peu luisant. Coloration : moitié antérieure de la tête rouge à rouge jaunâtre, moitié postérieure et le front noir brunâtre; mésosome, pétiole et appendices rouges teintés de brun; pronotum avec une tache dorsale foncée, gastre noir. Pilosité dorsale plus abondante : poils longs sur tout le clypéus, deux à cinq dans l’aire du triangle ocellaire, plus nombreux sur la partie dorsale du gastre. Pubescence : plus abondante, dense très courte et séparée, en particulier sur la tête et le gastre  (visible avec un grossiment de 50x). Mandibules : parfois marge basale avec un ou deux microdenticules.

Bioécologie. Espèce polygyne, parasite temporaire de Formica glacialis (Groupe subaenescens) dont les individus disparaissent progressivement après l’élimination de leur reine par l’intrusion d’une gyne fécondée de Formica ulkei et la naissance de ses rejetons. Elle construit des nids de petite taille, 0,5 x 0,8 x 5 m dans des sols glaiseux ou organiques, lesquels sont surmontés d’un dôme arrondi ou conique, formé de débris végétaux. De nouveaux nids sont développés par bourgeonnement des colonies âgées et polygynes. Habitats : prairies, prés, parfois orées de boisés. Elle se nourrit du miellat de membracides, de  pucerons et de cochenilles, d’insectes morts. Ouvrières butineuses agressives. AntWiki.org 2023, Ellison 2012, Holmquist 1928, Wheeler et al. 1994.

Répartition. Sud du Québec. Rare, son territoire demeure encore peu connu.

Répartition néarctique. Sud du Canada : de la Nouvelle-Écosse, du Nouveau-Brunswick jusqu’à l’Alberta. États-Unis : Nord-Est et Ouest moyen. Ellison et al. 2012, Fairweather et al. 2020, GBIF.org 2023, Naumann et al. 1999.

Formica ulkei Formica ulkei
Formica ulkei Formica ulkei


Références
Antweb.org. 2023. © California Academy of Sciences. Photographes des illustrations. Will Ericson : A1 et A2, spécimen type de Formica exsecta (CASENT0905703). April Nobile: 1, 2, 3, 4 (CASENT0104768). Shannon Hartman : 5, 6, 7, 8 (CASENT0280394).
AntWiki.org. 2023. Formica exsectoides & Formica ulkei. https://antwiki.org/wiki/Formica
& https://antwiki.org/wiki/Formica_ulkei.
Creighton, W.S. 1950. The ants of North America. Bulletin of the Museum of Comparative Zoology at Harvard College 104: 1-585.
Ellison, A.M., Gotelli, N.J., Farnsworth, E.J. & Alpert, G.D. 2012. A field guide to the ants of New England. Yale University Press, New Haven. 398 p.
GBIF.org. 2023. Territoire de F. exsectoides et de F. ulkei. https://www.gbif.org/fr/species/1314899
& https://www.gbif.org/fr/species/1315077.
Fairweather, A.D., Lewis, J.H., Hunt, L., Smith, M.A. & McAlpine, D.F. 2020. Ants (Hymenoptera: Formicidae) of Rockwood Park, New Brunswick: an assessment of species richness and habitat. Northeastern Naturalist 27 (3): 576-584.
Haviland, E.E. 1947. Biology and Control of the Allegheny Mound Ant. Journal of Economic Entomology 40 (3): 413-419.
Holmquist, A.M. 1928. Notes on the Life History and Habits of the Mound-Building Ant, Formica ulkei Emery. Ecology 9 (1): 70-87.
Naumann, K., Preston, W.B. & Ayre, G.L. 1999. An annotated checklist of the ants (Hymenoptera: Formicidae) of British Columbia. Entomological Society of British Columbia 96: 29-68.
Schär, S., Talavera, G., Espadaler, X., Rana, J.D., Andersen Andersen, A., Cover, S.P. & Vila, R. 2018. Do Holarctic ant species exist? Trans-Beringian dispersal and homoplasy in the Formicidae. Journal of Biogeography 2018: 1-12.
Seifert, B. 2000. A taxonomic revision of the ant subgenus Coptoformica Mueller, 1923 (Hymenoptera, Formicidae). Zoosystema 22 (3): 517-568.
Wheeler, G.C., Wheeler, J.N. and Kannowski, P.B. 1994. Checklist of the ants of Michigan (Hymenoptera: Formicinae). The Great Lake Entomologist 26 (4): 297-310.
 
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