Punaises - Lygaeidae

Description  Les punaises de la sous-famille des Lygaeinae sont généralement rouges ou orange avec de larges motifs noirs. Les autres punaises sont, selon les espèces, de couleur terne dans divers tons de gris, bruns ou rouille. Elles sont difficiles à identifier.

Henry (2009) note ce qui les caractérise: sillons transversaux sur les calli, une carène en Y sur le scutellum et la position dorsale des stigmates abdominaux II à VII.

Oncopeltus fasciatus
Nombres  Six genres et 10 espèces de Lygaeidae sont présents au Québec. Henry (2009) compte 102 genres et 968 espèces mondialement.
Habitat  On les observe souvent au sol ou sur la végétation basse, sur des fruits mûrs ou sur des fleurs. Certaines punaises préfèrent les arbres (Kleidocerys sp. sur le bouleau).
Alimentation  Des graines de divers végétaux (bouleau, aulne, asclépiade, onagre, etc.). Les Lygaeidae sont en général polyphages; Oncopeltus fasciatus se nourrit exclusivement d'asclépiade.
Taille  Entre 3,3 et 18 mm.
Taxinomie  Incluait jadis, à titre de sous-familles, les Artheneidae, Berytidae, Blissidae, Cymidae, Geocoridae, Lygaeidae, Oxycarenidae, Pachygronthidae, et Rhyparochromidae, maintenant élevées au rang de familles.

Lygaeinae
Quatre espèces aux couleurs spectaculaires représentent la sous-famille au Québec. Deux espèces sont présentées ci-dessous.
Lygaeus kalmii angustomarginatus
Deux sous-espèces en Amérique du Nord
Stål est le descripteur de Lygaeus kalmii (1874). Parshley a nommé la sous-espèce angustomarginatus pour différencier les populations de l'est de celles de l'ouest (kalmii) de l'Amérique du Nord. Lygaeus kalmii angustomarginatus qu'on observe au Québec n'a pas deux gros points blancs sur la membrane qui est contournée par une très fine ligne blanche. Lygaeus kalmii kalmii a deux grandes taches blanches sur la membrane qui est bordée d'une large bande blanche (voir ici). Simanton & Andre (1936) notent qu'en captivité, les deux sous-espèces se sont volontiers accouplées pour produire des punaises correspondant à l'une ou l'autre des sous-espèces ou encore à des formes intermédiaires.
Nourriture
Lygaeus kalmii est polyphage et se nourrit, en plus de l'Asclépiade commune (Asclepias syriaca), de divers végétaux et même d'insectes morts ou vulnérables.
Elle serait portée au cannibalisme; elle se nourrit des insectes piégés par la sève collante de l'asclépiade ou vulnérables comme la chenille du Monarque (Danaus plexippus). Root (1986) l'a vue se nourrir d'une abeille qui avait été capturée par un réduve embusqué parmi les fleurs d'une asclépiade. La punaise tolère la cardénolide, une toxine nocive pour plusieurs insectes et présente dans toutes les parties de l'asclépiade. Elle peut non seulement la consommer directement sans danger mais aussi se nourrir des insectes qui en ont mangé.
Reproduction
Les femelles pondent à l'intérieur des tiges ou à la surface d'une feuille tombée au sol, dans des interstices entre deux feuilles terminales de l'asclépiade (Root, 1986). En captivité, Simanton & Andre (1936) ont noté la fécondité de 12 femelles. Elles ont pondu entre 807 et 1482 oeufs, une moyenne de 1029 oeufs chacune. Les masses d'oeufs contenaient en moyenne 48 oeufs. Les auteurs ont observé des oeufs pondus individuellement ou en groupe de 30 ou plus. Les nymphes sont grégaires. L'espèce hiberne au stade adulte.
Lygaeus kalmii angustomarginatus
Lygaeus kalmii angustomarginatus Lygaeus kalmii angustomarginatus Lygaeus kalmii angustomarginatus
Le large motif noir en forme de coeur sur le dos est distinctif. Un 30 septembre, sur des graines d'asclépiade. La punaise consomme toutes les parties de la plante: sève, fleurs, graines. L. kalmii cachée dans les longues soies du fruit de l'asclépiade.
Lygaeus kalmii angustomarginatus Lygaeus kalmii angustomarginatus Lygaeus kalmii angustomarginatus
Deux nymphes au stade V s'alimentent d'euphorbe (à gauche) et d'armoise (à droite) alors que des plants d'asclépiades sont accessibles à quelques mètres de là. Ces observations concordent avec celles de Root (1986) qui a observé, en Californie, que L. kalmii produit une première génération estivale en l'absence de la plante. D'autres végétaux et des insectes morts sont alors consommés. Une nymphe au stade III. De nombreuses punaises immatures circulent au sol et consomment des graines de diverses plantes tombées sur le gravier.
Oncopeltus fasciatus
Oncopeltus fasciatus est remarquable à plusieurs points de vue. Sa grande taille et ses couleurs spectaculaires attirent l'attention. Grégaires aux stades de nymphe et d'adulte, les pontes d'une trentaine d'individus s'étalent bien en vue sur les feuilles ou les fruits de l'asclépiade. L'espèce, très sélective dans le choix de sa nourriture n'hiberne pas au Québec et entreprend en octobre un long voyage vers les Antilles, le Mexique ou le sud des États-Unis (Dingle, 1974). Plusieurs entomologistes ont étudié le vol, le comportement et les préférences alimentaires de l'espèce.

Les photos d'O. fasciatus proviennent de deux colonies distinctes, observées en 2020 à une quarantaine de kilomètres à vol d'oiseau l'une de l'autre. La première, composée essentiellement de nymphes au stade V, a été observée assidûment durant 13 jours, dans l'espoir de voir des adultes. Hélas, le plant d'asclépiade a été fauché et la colonie a péri à l'occasion d'un « beau ménage » effectué par la ville de Terrebonne. La seconde colonie, à l'ouest de Montréal, a été visitée une seule fois et comportait surtout des adultes et quelques nymphes aux stades IV et V.
Seulement l'asclépiade, et surtout les graines
O. fasciatus s'est spécialisée dans un seul genre d'hôte, Asclepias sp., mais plus encore dépend des graines de la plante pour achever son développement et se reproduire. Les femelles doivent se nourrir des graines à défaut de quoi, si elles se nourrissent sur les fleurs, par exemple, elles ne pondent que quelques oeufs (Ralph, 1976).
Des graines difficiles à atteindre
Durant la croissance des nymphes, les fruits d'asclépiade n'ont pas toujours atteint leur maturité et les graines nourricières sont protégées par la paroi épaisse du fruit où elles sont enfermées. Le rostre des nymphes aux trois premiers stades est généralement trop court pour atteindre les graines à l'intérieur du fruit. Le troisième stade réussit parfois à atteindre quelques graines, où l'enveloppe est plus mince, par exemple le long de la ligne de suture du fruit. Le stade IV a accès à un plus grand nombre de graines. Le stade V et l'adulte ont accès à presque toutes les graines, à travers l'enveloppe du fruit (Ralph, 1976). L'auteure a observé que les nymphes aux trois premiers stades font flétrir très rapidement les plants d'asclépiades. Toutefois, si elle les nourrissait avec des graines de la plante, celle-ci ne montrait pas de signes de flétrissement avant deux semaines ou plus (voir les dommages à droite).

Oncopeltus fasciatus nymphe stade IV. Les feuilles d'asclépiades étaient noircies et racornies et finissaient par tomber.
Adaptation
O. fasciatus s'est limitée à un hôte unique et à disponibilité limitée dans le temps pour le développement (nourriture, refuge) de sa progéniture. L'espèce s'est adaptée de diverses manières: l'oviposition possible dès le lendemain de l'accouplement, une ponte abondante de trente oeufs en moyenne, le choix d'un site de ponte comportant plusieurs asclépiades à proximité les unes des autres (Sauer & Feir, 1973) et la synchronisation de la reproduction avec la disponibilité des asclépiades (Ralph, 1976). Les premières nymphes observées étaient toujours sur des fruits ayant atteint, ou étant sur le point d'atteindre leur maturité (Ralph, 1977).
Changer de plant mais rester ensemble
Les nymphes restent généralement sur leur plant d'origine durant les trois premiers stades puis changent deux à trois fois de plant, parfois se séparant en petits groupes. Mais parfois elles restent sur le même plant durant les cinq stades. L'auteure a vu des nymphes se nourrir de graines sur un plant desséché et aller sur un plant voisin encore vert pour consommer du liquide (Ralph, 1976).

Même si la femelle choisit généralement comme site de ponte une plante de bonne taille et comportant plusieurs fruits, celle-ci peut être endommagée ou être insuffisante pour nourrir toutes les nymphes qui se déplaceront alors sur une asclépiade voisine. Si la nouvelle plante est éloignée, les nymphes risquent de périr durant leur trajet ou de s'éparpiller sur diverses plantes et perdre ainsi les avantages d'être en groupe (Sauer & Feir, 1973).

Ralph (1976) a observé à deux reprises un groupe de nymphes quitter une asclépiade pour une autre: les nymphes marchaient ou couraient sur le plant avant de disparaître au sol. Elles étaient solitaires et dispersées dans toutes les directions, dans un rayon de 20 à 50 cm autour du premier plant. La quête des nymphes s'est interrompue quand chacune d'elles a rejoint un groupe, sur une nouvelle asclépiade, en fin de journée.

38 nymphes au stade V ont quitté la petite asclépiade à gauche (4 fruits) pour rejoindre celle de droite, plus grande (8 fruits). Malgré la végétation très dense au sol et la distance de 1,3 mètre parcourue, toutes les nymphes se sont regroupées.
Après la mue au stade adulte, les punaises restent sur place en groupe, une dizaine de jours avant de s'envoler (Ralph, 1977). Les punaises sont par petits groupes ou parfois seules sur les feuilles et les fruits de l'asclépiade. À droite, les protubérances sur le fruit sont visibles.
Des ravageurs qui aident les nymphes
Les jeunes nymphes se rassemblent souvent autour des dommages infligés aux fruits par le Charançon de l'asclépiade (Rhyssomatus lineaticollis). Les minuscules punaises aux stades I et II peuvent se glisser à l'intérieur du fruit perforé pour atteindre directement les graines. La Chrysomèle de l'asclépiade (Labidomera clivicollis) et la chenille du Monarque (Danaus plexippus) endommagent occasionnellement le fruit et rendent les graines accessibles aux jeunes nymphes (Ralph, 1976). Le Longicorne de l'asclépiade (Tetraopes tetrophthalmus) est au contraire un compétiteur à O. fasciatus car il diminuerait la production de fruits (Ralph, 1977).
Pas n'importe quelle asclépiade
En laboratoire, Chaplin (1980) a observé que les nymphes se nourrissaient volontiers des graines des six espèces d'asclépiades présentes au Missouri. Toutefois, en liberté, les femelles choisissent de pondre sur l'Asclépiade commune (Asclepias syriaca) et l'Asclépiade verticillée (A. verticillata), seules espèces permettant de soutenir efficacement le développement des nymphes.

Mais l'auteur s'interroge. Partant du fait que l'espèce est dépendante des graines et de l'alimentation en groupe pour se développer optimalement, pourquoi la femelle pond-elle autant d'oeufs? La trentaine de nymphes en moyenne par ponte réduit le nombre d'espèces d'asclépiades dont les plants produisent beaucoup de graines, et qui poussent en colonies de plants rapprochés. De plus, les nymphes qui doivent se déplacer d'un plant à l'autre risquent de périr durant le trajet ou de se diviser en petits groupes moins productifs. Chaplin suggère que la production de tant d'oeufs par ponte serait peut-être une adaptation évolutive reliée à l'optimisation de l'ingestion de nourriture en groupe ou à l'intensification de l'effet aposématique.

Oncopeltus fasciatus adulte sur un fruit.
Défenses de l'asclépiade
L'Asclépiade commune n'est pas sans défenses devant la colonisation d'O. fasciatus. L'enveloppe épaisse des fruits dont dépend la punaise pour bien se développer et se reproduire limite l'accès aux graines, affame les nymphes qui périssent ou changent de plant. Les asclépiades qui poussent isolément sont ignorées par les punaises. Par ailleurs les punaises ne détruisent pas toutes les graines des fruits des colonies denses et productives où elles s'établissent volontiers. D'autres espèces d'asclépiades sont moins attrayantes en poussant isolément, en produisant moins de fruits par plants, en s'établissant en milieux humides où le déplacement entre deux plants est difficile ou alors en dispersant leurs graines plus tôt (Ralph, 1976).
Grégarité
Sauer & Feir (1973) ont constaté que les nymphes solitaires peuvent se développer jusqu'à l'âge adulte mais sont légèrement plus petites. Leur taux de survie est plus bas que celui des nymphes élevées en groupe de cinq à 10. Et plus il fait froid, plus elles sont grégaires. Les nymphes que Ralph (1976) a élevées en groupe d'une vingtaine d'individus avaient un meilleur taux de survie durant les stades où les graines leur étaient inaccessibles. La grégarité atténuerait les effets de cette privation.

Bongers & Eggermann (1971) ont observé que les adultes se nourrissant en groupe ingéraient plus de nourriture que s'ils le faisaient en solitaire. Les auteurs pensent que la « stimulation sociale » peut expliquer ce phénomène. De plus, quand les punaises se nourrissent, elles injectent de la salive avant d'aspirer la nourriture. L'alimentation en groupe permet de mettre en commun une partie de la salive qui reste dans la nourriture.

Grégaires!
Les nymphes sont attentives à l'approche d'un observateur. Elles se déplacent légèrement ou se jettent au sol. Deux adultes se dorent au soleil. Deux nymphes aux stades IV et V. Le stade IV est atypique. Une seule tache noire entoure une glande odorante. Il y en a habituellement deux.
Dans la colonie observée durant 13 jours, plusieurs adultes Lygaeus kalmii ont été observés en présence des nymphes O. fasciatus. L. kalmii est un compétiteur mais aussi un prédateur occasionnel des nymphes O. fasciatus (Ralph, 1977). Sur la photo au centre, la position respective des deux espèces fait penser à une collaboration, chacune surveillant les arrières de l'autre. D'autant plus qu'une araignée (→) était tapie à quelques centimètres des punaises.
Vol et migration
En 1966 Dingle constate qu'il n'y a pas de données disponibles à propos de l'hibernation de l'espèce au nord de son aire de distribution. Toutefois, sa capacité et sa puissance de vol étudiées en laboratoire permettent de penser que l'insecte migre dans le sud des États-Unis où son hôte unique, l'asclépiade, est disponible presque tout l'hiver. L'auteur conclut que même si certains individus pouvaient hiberner dans le nord, une partie de la population est migrante. O. fasciatus migre vers le nord par étapes, chaque génération franchissant quelques centaines de kilomètres plus avant (Dingle, 1974). Dans la région au nord de son aire, les adultes migrants arrivent à la fin du printemps et au début de l'été. Les femelles s'accouplent et pondent à proximité des fruits d'asclépiades en développement (Dingle, 1968b). À l'automne, les adultes consacrent leur énergie au vol vers le sud plutôt qu'à la reproduction, retardée jusqu'à leur arrivée à destination, où la nourriture est disponible (Dingle, 1974).

Caldwell (1974) rapporte que O. fasciatus a été capturée dans un filet à plusieurs centaines de pieds en altitude; il a aussi vu des adultes prendre leur envol et disparaître à 80-100m du sol. L'espèce semble profiter des courants aériens nord-sud.

Certains individus ne volent jamais mêmes s'ils vivent aussi longtemps et se reproduisent avec autant de succès que ceux qui volent. Mâles et femelles ont un pic d'activité de vol 8 à 10 jours après leur mue imaginale puis les mâles seulement, un second pic entre 30 et 35 jours (Dingle, 1965). En laboratoire, Dingle (1968a) a augmenté la proportion d'individus volants au sein d'une population en sélectionnant pour la reproduction les adultes qui étaient volants; il conclut que ce comportement a, du moins en partie, une origine génétique.

Différentes variables (photopériode, température, disponibilité de l'asclépiade, âge des femelles) interréagissent de façon complexe pour déclencher les grandes migrations printanières et automnales qui impliquent des vols de longue durée.

Cannibalisme
Dans certaines circonstances, les nymphes O. fasciatus se mangent les unes les autres. La nymphe au stade IV ci-dessus a eu une brève tentation mais elle est allée plutôt répéter son manège sur la nymphe au stade V à l'arrière-plan. Dans les deux cas, elle n'a pas semblé se nourrir des nymphes. D'après Sauer & Feir (1973), les oeufs d'une ponte éclosent en même temps, évitant ainsi la prédation entre nymphes. Ralph (1977) n'a pas observé de cannibalisme en captivité, quand des graines exposées étaient offertes aux nymphes.
Et au Québec?
Au Québec, on observe quatre espèces d'asclépiades (Canadensys, accès oct. 2020), deux étant rares. L'asclépiade commune, avec ses fruits et ses graines abondants, ses colonies à plants rapprochés et ses fruits couverts de longues protubérances est l'hôte où s'établit généralement O. fasciatus. Sauer & Feir (1973) ont observé que les fruits lisses sont rarement choisis comme sites d'oviposition, les femelles préférant les fruits avec des protubérances de 2 mm ou plus. Au Québec, l'Asclépiade incarnate a des fruits lisses et ses colonies sont clairsemées. Elle n'est pas le premier choix des femelles O. fasciatus.

En 2020, sur iNaturalist, une dizaine d'observateurs ont publié des photos prises au Québec d'individus solitaires, de groupes de nymphes ou d'accouplements d'O. fasciatus. La seule autre année où l'espèce a été rapportée sur ce site (accès en oct. 2020) date de 2010. L'année 2020 pourrait être exceptionnelle. La mention la plus nordique en 2020 est celle d'un accouplement, en Abitibi-Témiscamingue, le 2 août à la latitude de 48.661202.
Une colonie de 37 nymphes au stade V, plus une qui a mué de IV à V a été observée à Terrebonne du 3 au 16 septembre. Aucune n'a mué au stade adulte durant cette période de 13 jours où les températures nocturnes ont été huit fois en dessous de 10°C. Les graines étaient encore enfermées dans les fruits.

D'après Andre (1934), la température, le degré d'humidité et la nourriture disponible agissent sur la durée des stades de développement des nymphes. L'auteur a mesuré en laboratoire la durée du stade V qui était en moyenne de 7,3 jours à température constante de 34°C et 70% d'humidité et de 11 jours à 24,5°C.

Le froid tue les nymphes qui n'atteignent pas le stade adulte avant les premiers gels (Dingle, 1968b).
Oncopeltus fasciatus nymphes au stade V.
Bain de soleil matinal (9h30) après une nuit froide à 5,4 °C.
Le 6 septembre, la nymphe en haut à droite était la seule de la ponte au stade IV. Ici, deux jours plus tard, elle est au stade V mais plus mince et plus foncée que les trois autres nymphes.
Ischnorhynchinae
Deux espèces très semblables représentent la sous-famille au Québec. Kleidocerys resedae et K. ovalis. Ce n'est que tout récemment, lors de l'inspection d'une douzaine de collections d'insectes du Québec, que Roch (2008) a découvert en grand nombre la présence jusque-là inaperçue de K. ovalis. Les deux espèces se différencient par la couleur des calli et des antennes (Barber, 1953). Voir le détail ci-dessous. À noter que certains individus, aux zones foncées moins marquées, peuvent être difficiles à déterminer, surtout à partir d'une simple photo. De plus, d'après Roch (2008) les deux espèces de Kleidocerys ont été observées ensemble sur une même plante. Le clavus des espèces de cette sous-famille est ponctué.
Kleidocerys resedae
K. resedae a une distribution holarctique. L'espèce se nourrit des graines mûres de près d'une cinquantaine de plantes appartenant à 14 familles (Wheeler, 1976). Les chatons du bouleau et de l'aulne seraient leur nourriture préférée. Les adultes hibernent au stade adulte au Québec (Roch, 2008). Le long ovipositeur de la femelle insère les oeufs individuellement ou par groupes de deux ou trois à l'intérieur d'un chaton, sur les nucules (Jordan, 1933). L'auteur pense que la longue durée de la ponte explique que différents stades de développement sont en présence, au même moment.

Dans le Maine, Heinrich a observé un remarquable concert de K. resedae. Lorsque dérangés, des centaines d'adultes enfouis dans la litière sous des bouleaux émettaient une stridulation synchronisée. À la veille d'hiberner, ce comportement est interprété comme un signal d'alerte (Slater & Baranowski, 1990). Mâles et femelles peuvent striduler.
Kleidocerys resedae Kleidocerys resedae Kleidocerys resedae
Chez K. resedae les calli noirs (A →) et la couleur des antennes permettent de différencier l'espèce de K. ovalis. Les premiers et derniers articles des antennes ainsi que les deux extrémités des seconds et troisièmes articles sont noirs. Chez plusieurs individus, une mince zone à l'avant du scutellum (B →) est foncée. Kleidocerys resedae adulte et une nymphe au stade II ou III sur un chaton de bouleau à la mi-août.
Kleidocerys resedae Kleidocerys resedae Kleidocerys resedae
À la mi-août, des centaines de punaises sont rassemblées sur les fruits d'un immense massif de sorbaria. Elles ne sont pas posées à la surface des grappes mais plutôt cachées entre les fruits et quasiment invisibles. Les punaises sont, à part quelques individus, toutes en couple et superposées. L'accouplement ne semble toutefois pas avoir lieu au moment de l'observation. Un 24 septembre, des nymphes à divers stades sont observées sur du sorbaria. Les adultes sont apparus le 1er octobre.
Kleidocerys resedae Kleidocerys resedae Kleidocerys resedae
Quelques adultes Kleidocerys resedae ont permis l'identification à l'espèce de plusieurs dizaines de nymphes. Elles se nourrissaient sur les chatons d'un bouleau ou se reposaient dans l'enroulement de feuilles séchées. À gauche, la nymphe est au stade I et à droite, au stade II, d'après les illustrations de Claassen (1921). Kleidocerys resedae nymphe au stade IV sur du sorbaria. Les poils épais et courts qui la couvrent sont semblables à ceux de Neortholomus scolopax (voir en bas de page).
Kleidocerys ovalis
Les calli de K. ovalis (A →) sont foncés mais pas noirs comme ceux de K. resedae. Seul le dernier article des antennes est noirâtre. Le premier article est parfois brun foncé mais pas noirâtre et les articles II et III sont entièrement bruns.

La punaise se nourrit de bouleau, notamment. Des nymphes y ont été observées en grand nombre (voir ci-dessous). L'observation d'un adulte ailé sur une plante n'en fait pas nécessairement un hôte.
Kleidocerys ovalis Kleidocerys ovalis
Kleidocerys ovalis Kleidocerys ovalis Kleidocerys ovalis
Une nymphe en groupe compact avec des adultes et d'autres nymphes sur du bouleau, à la mi-août. Ci-dessus, une vue générale et rapprochée d'un important rassemblement de K. ovalis à la mi-octobre. Plusieurs centaines de punaises, rassemblées en petits groupes compacts s'étalaient sous les feuilles de dizaines de feuilles du bouleau.
Orsillinae
Les punaises appartenant à cette sous-famille sont difficiles à déterminer. En effet, elles se ressemblent entre elles mais elles peuvent aussi être confondues avec des punaises de la famille des Rhopalidae. Voir ci-dessous.
Neortholomus scolopax
N. scolopax est couverte d'une pilosité courte et aplatie et de poils plus longs mais clairsemés. La couleur générale de l'espèce varie, selon les individus, de brun à gris. L'insecte serait polyphage. En effet, Hamilton (1983) note que ses hôtes appartiennent à 13 familles différentes de végétaux. Toutefois, l'insecte aurait été capturé beaucoup plus fréquemment sur l'Onagre bisanuelle (Oenothera biennis).
Neortholomus scolopax
Sur de l'Onagre bisanuelle, début octobre, on observe des dizaines d'accouplements comme ci-dessus.
Neortholomus scolopax
Les deux punaises ci-dessus sont très semblables. Stictopleurus appartient pourtant à une autre famille, les Rhopalidae. Pour les différencier on peut noter, chez Neortholomus la présence d'une carène jaune pâle sur le scutellum (A →); les nervures de la corie (B →) sont moins saillantes; la membrane est laiteuse et traversée en son centre par une bande de taches sombres et irrégulières (C →). Les cunéus (D →) sont rougeâtres.
Neortholomus scolopax Neortholomus scolopax

Une nymphe au stade III ou IV sur le fruit de la potentille. Notez les poils sur les yeux. N. scolopax se nourrit du fruit de l'euphorbe au début d'octobre.
Nysius sp.
Au Québec, on compte trois espèces de Nysius. C'est très difficile, plus particulièrement à partir de photos, d'identifier les Nysius à l'espèce. Leur couleur varie de beige pâle à noirâtre. La marge postérieure des cories (→) comporte généralement une ou plusieurs sections brun foncé, ce caractère pouvant distinguer Nysius de Neortholomus.

Les Nysius se nourrissent des graines des végétaux herbacés; ils sont en général plus ou moins largement polyphages, et plusieurs espèces sont susceptibles de pullulements (Péricart, 1998A).
Nysius Nysius Nysius
Nysius Nysius Nysius
Ce Nysius a une antenne difforme. Il lui manque un article mais l'ensemble de l'antenne a une longueur similaire à l'autre. Voir ici ce qu'en dit Péricart. Photo ci-dessus, de haut en bas: un adulte, deux nymphes et un accouplement. Nysius sp. L'absence de pilosité lui donne un air plus « net » que Neortholomus. Les rayures de la tête et du thorax sont présentes ou non.
Comparaison des nymphes Kleidocerys, Nysius et Neortholomus.
Trois paires d'ostioles sur l'abdomen:
- Kleidocerys

Deux paires d'ostioles sur l'abdomen:
-Nysius, plutôt glabre.
-Neortholomus, couvert de poils blancs, courts et robustes.

Les nymphes appartenant aux Lygaeinae sont rouges ou orange et se distinguent bien des punaises des autres sous-familles (voir plus haut, sur cette page, Lygaeus kalmii).

Les nymphes présentées ici étaient en compagnie d'autres nymphes et de plusieurs adultes au genre confirmé. Les hôtes (bouleau, typha, potentille, etc.) étaient compatibles avec l'identité attribuée aux punaises.
Kleidocerys
Nymphe Kleidocerys resedae, stade V. La présence de trois paires d'ostioles (→) est distinctif. Le dos est couvert de poils clairs très courts et robustes. La tête n'a pas de rayures, contrairement à celle de certains Nysius et Neortholomus. Cette nymphe du genre Kleidocerys a trois paires d'ostioles sur l'abdomen et des poils blancs courts et raides. Péricart (1998A) note la bande rouge au centre du thorax. La nymphe était sur du typha, un de ses hôtes.
Nysius Neortholomus scolopax Neortholomus scolopax
Nymphe au stade V du genre Nysius. L'abdomen a deux paires d'ostioles (→). La tête et le thorax ont parfois des rayures contrastées. Les nymphes n'ont pas la pilosité des Neortholomus. Nymphe Neortholomus scolopax au stade V. Les deux photos ci-dessus représentent le même individu. Le corps est couvert de très courts poils blancs présents même sur les yeux. Les deux paires d'ostioles (→) permettent de différencier N. scolopax de Kleidocerys qui a une pilosité similaire mais trois paires d'ostioles. Par ailleurs, la pilosité permet de différencier N. scolopax de Nysius qui lui ressemble, qui a le même nombre de paires d'ostioles, mais qui est plutôt glabre.

Liste des espèces de Lygaeidae du Québec
La liste des espèces a été tirée de Maw et al. (2000); Kleidocerys ovalis y a été ajoutée et Nysius thymi enlevée (Larson & Scudder, 2018). Pour connaître les espèces présentes dans les régions adjacentes au Québec, consultez la liste de Roch (2014). La longueur des punaises provient de Blatchley (1926) et de Barber (1947 et 1953).
Nom
Sous-famille
Longueur
(mm)
Note
Kleidocerys ovalis Barber Ischnorhynchinae 5,0
Dans Roch (2014)
Kleidocerys resedae (Panzer) Ischnorhynchinae 4,0 - 5,0 Dans Maw et al. (2000), on trouve les deux sous-espèces K. resedae geminatus (Say) et K. resedae resedae (Panzer) pour le Québec.
Lygaeospilus tripunctatus (Dallas) Lygaeinae 3,5 - 4,5
Lygaeus kalmii angustomarginatus Parshley Lygaeinae 10,0 - 12,0
Lygaeus turcicus Fabricius Lygaeinae 10,0 - 11,5
Neortholomus scolopax (Say) Orsillinae 5,0 - 6,0
Nysius angustatus Uhler Orsillinae 4,3 - 4,50, mâle
Nysius groenlandicus (Zetterstedt) Orsillinae 4,1 - 4,5
Nysius niger Baker Orsillinae 3.3 - 3,7 mâle
Oncopeltus fasciatus (Dallas) Lygaeinae 13 - 18

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