Les Cahiers Léon-Provancher

Pour jeter un regard neuf sur l’œuvre de cet acteur
 important de l’histoire scientifique au Québec

La connaissance de la vie et de l’œuvre de Léon Provancher (1820-1892) est en progression depuis quelques années. Des historiens et des scientifiques ont entrepris d’évaluer sa contribution scientifique, la valeur de ses collections entomologiques, de même que la place qu’il occupait dans la science de son temps. Ces toutes nouvelles publications ont pour but de : mettre en évidence certains aspects moins connus de l’œuvre de Provancher, présenter, de façon claire et rigoureuse, l’importance scientifique et historique de l’œuvre de Provancher, rendre accessible les quelques manuscrits inédits produit par Provancher lors de son vivant, favoriser et faciliter de futurs travaux de recherches inspirés par ce pionnier de la science au Québec.

Les sujets pouvant se prêter à la production des Cahiers Léon-Provancher sont nombreux. Prenant exemple des cahiers consacrés à l’œuvre d’écrivains célèbres, ces cahiers regrouperont toute étude liée à Provancher et à son œuvre scientifique, comme des études techniques, historiques, prosopographiques ou entomologiques, ou encore la publication d’inédits et de correspondances échangées avec d’autres scientifiques nord-américains et européens. Tous les travaux sérieux de biologistes, d’historiens et d’autres « professionnels » sur Provancher trouveront leur place dans les pages de ces cahiers. Contactez-nous ! Pour en savoir plus sur l'œuvre de Provancher, cliquez ici.

L’abbé Léon Provancher (1820-1892) est connu dans l’histoire des sciences au Québec comme un naturaliste. Fondateur et animateur de la première revue consacrée aux sciences naturelles au Québec, Le Naturaliste canadien, Provancher consacre la plus grande partie de sa vie à l’étude de plusieurs branches de l’histoire naturelle, de la botanique à l’entomologie en passant par la conchyliologie, l’ornithologie, la mammalogie et l’ichtyologie. C’est toutefois dans le domaine de l’entomologie qu’il effectue ses travaux les plus importants. Les recherches qu’il mène sur l’ordre des Hyménoptères, la publi­cation de ses découvertes dans Le Naturaliste canadien et la parution de trois volumes de la Petite faune entomologique du Canada lui valent une considération internationale. Cependant, au Québec, les historiens tardent à reconnaître sa contribution scientifique. Ce travail de recherche, qui se situe à la jonction de l’histoire et de l’entomologie, vise à combler cette lacune.

L’analyse du réseau de correspondance entomologique de Provancher, du contenu de sa bibliothèque scientifique et du corpus des Hymé­noptères qu’il découvrit a permis de constater que Provancher utilise une démarche scientifique dans l’élaboration de son œuvre entomologique et taxinomique. Sa contribution scientifique se situe principalement dans ces deux disciplines qui étaient en plein développement au XIXe siècle, en Amérique du Nord.

Ces connaissances nous montrent clairement que Provancher, malgré son isolement relatif, était un savant très impliqué dans le dévelop­pement de la science de son temps. Il contribue ainsi, plus que tout autre, au désenclavement du Québec dans le domaine des sciences naturelles en jetant les bases de la recherche en entomologie, en conchyliologie et en botanique.

Madame Mélanie Desmeules est historienne et naturaliste. En 2003, à l’Université du Québec à Chicoutimi, elle dépose son mémoire de maîtrise intitulée : La contribution entomologique et taxinomique de l'abbé Léon Provancher. En janvier 2004, elle a entrepris sa thèse de doctorat intitulée Pratiques scientifiques et réseaux des naturalistes au Québec, 1850-1920, en histoire des sciences à l’Université Laval.

Pendant les 25 ans qu’il consacra à l’étude des insectes, Provancher honora 35 personnages en leur consacrant une espèce. Parmi les 45 espèces qu’il dédia à ses contemporains, nous comptons trente-huit espèces d’Hyménoptères, six espèces d’Hémiptères et une espèce de Neuroptères. Les noms de vingt-quatre espèces sont encore valides. Une courte biographie de chacun des personnages honorés par Provancher est accompagnée des informations disponibles sur les espèces qui leur sont dédiées.

Monsieur Jean-Marie Perron est professeur émérite, retraité de l’Université Laval. Il a été administrateur de la revue Le Naturaliste canadien, devenue, en 1994, la publication officielle de la Société Provancher, dont il a été l'un des vice-présidents. Monsieur Perron a recensé et regroupé de nombreux éléments du patrimoine entomologique québécois dont celui de l’Abbé Léon Provancher.

Entre 1869 et 1892, Provancher publia 1 216 descriptions d’espèces nouvelles d’insectes; ses dernières descriptions paraîtront dans son Naturaliste quelques années après son décès. Aujourd’hui, les révisions de son matériel entomologique effectuées par des taxinomistes de réputation ont permis de localiser 1 081 spécimens-types : 935 d’entre eux sont conservés à l’Université Laval, 69 à la Collection nationale du Canada, 7 au United States National Museum de Washington, 47 ne sont pas encore localisés et 23 sont considérés comme disparus. Ce Cahier réunit pour la première fois, sur une liste unique, l’ensemble de ses types, donnant pour chacun le nom original de l’espèce, son statut taxinomique, l’année de sa publication, la référence, le sexe, son numéro de catalogue et sa localisation. Quelques notes historiques sur la collection de types et une courte analyse de l’œuvre taxinomique de Provancher accompagnent cette liste. Cette analyse vient jeter un éclairage nouveau sur l’héritage entomologique qu’il nous a légué. Elle illustre une surprenante diversité d’intérêts entomologiques chez Provancher et ses vastes connaissances qu’il a pu acquérir sur le monde des Insectes au cours des trente dernières années de sa vie, malgré ses faibles ressources et dans une société très peu ouverte sur les sciences.

Au cours des quarante–cinq dernières années de sa vie, Léon Provancher a réuni des spécimens d’insectes du Québec en une collection inégalée pour son temps. L’analyse de la partie personnelle de cette collection et de celle qu’il vendit au gouvernement du Québec en 1877 révèle qu’elles renfermaient, selon ses catalogues, plus de 12 630 spécimens, répartis en 5 236 espèces, 1 801 genres, 176 familles et 9 ordres différents. Les Coléoptères sont de loin le groupe d’insectes qu’il a le plus échantillonné. Cet ordre réunit à lui seul 35 % des familles, 46 % des genres et 40 % des espèces. Pour leur part, les Hyménoptères comptent 13 % des familles, 22 % des genres et 37 % des espèces. Sa plus grande contribution aux connaissances de l’entomofaune du Québec concerne les Hyménoptères, les Homoptères et les Hémiptères. La collection contient la plupart des spécimens types des espèces qu’il a nommées et décrites dans ces ordres. Provancher se servit de sa collection pour réaliser un ouvrage magistral pour son temps, La Petite faune entomologique du Canada, composé de trois volumes. Une courte biographie de Provancher, une description détaillée de sa méthodologie, une courte analyse de sa Petite faune, l’histoire des collections depuis son décès jusqu’à aujourd’hui sont présentées dans ce travail. Ses collections et sa Petite faune montrent la façon qu’un naturaliste du XIXe siècle concevait la classification des insectes. L’ensemble des collections du naturaliste est un des plus beaux héritages entomologiques qui nous soient parvenus de la seconde moitié du XIXe siècle.

En 1889, le collège de Lévis achetait de Léon Provancher une collection de spécimens zoologiques variés pour servir de base à la création de leur musée. Elle contenait 3 295 espèces d’insectes dont 402 avaient été nommées par Provancher. 65,5 % des genres et 56,1 % des espèces d’insectes de la collection personnelle de Provancher y sont représentés. À ce jour, six lectotypes et sept paralectotypes ont été désignés par les taxinomistes. La collection d’insectes du naturaliste nous est parvenue en excellent état de conservation. Ce legs de la corporation Œuvre David-Déziel à l’Université Laval permet de réunir le matériel de Provancher et facilite sa conservation, son accessibilité et les recherches futures.

De la parution de son Essai sur les insectes et les maladies qui affectent le blé, en 1857, jusqu’à l’année précédant son décès, en 1892, l’abbé Léon Provancher publiera plusieurs monographies, fascicules, opuscules, récits de voyage, en plus des vingt volumes de sa revue scientifique. La Flore canadienne, la Petite faune entomologique du Canada et Le Naturaliste canadien seront des ouvrages majeurs qui laisseront une marque sans précédent dans les annales scientifiques du Québec et du Canada au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle. Son œuvre sera un reflet de sa personnalité, de sa méthodologie et de sa longue expérience. Elle témoignera de la mission qu’il s’était donnée : éveiller ses concitoyens à l’étude des sciences, former les jeunes dans les différents niveaux d’enseignement, laisser à son pays des documents scientifiques pratiques, les plus complets possible, permettant au plus grand nombre d’observateurs de pousser plus loin par eux-mêmes leurs connaissances de la Nature.

L’édition en sciences naturelles au XIXe siècle au Québec est marquée par les productions de Léon Provancher. Les ouvrages des auteurs américains de sa bibliothèque seront sa principale source d’inspiration et de modèle pour illustrer ses monographies et sa revue Le Naturaliste canadien. La provenance des gravures et le nom des graveurs et des éditeurs se retrouvent dans sa volumineuse correspondance qu’il a conservée de 1868 jusqu’à son décès survenu en 1892. Des graveurs de Québec, de Montréal et de Toronto signeront plusieurs gravures. Plusieurs d’entre elles seront produites par des artisans de Québec à partir de dessins de spécimens, notamment les illustrations des espèces qu’il a nommées et décrites. De nombreuses gravures proviendront d’éditeurs américains.

Ce huitième Cahier a pour objectif de sortir de l'oubli un grand projet innovateur de Léon Provancher. Il montre l'esprit d'initiative peu commun qui animait le naturaliste et sa volonté d'activer et de populariser l'étude des sciences avec des méthodes nouvelles. Il voulait inviter ses concitoyens à s’inscrire dans un courant populaire apparu en Europe et en Amérique. Les huit tableaux faisant partie de ce projet ont été reconstitués le plus fidèlement possible selon ses indications. Ils sont illustrés de figures montrant la flore et la faune du Québec dessinées par l'artiste Adolphe Rho. Le texte original accompagne chaque tableau.

Le Dr Perron présente ainsi cet ouvrage de Provancher : « L’abbé Léon Provancher n’était pas un théoricien mais plutôt un homme de terrain. Répertorier sur le territoire québécois les êtres vivants connus, nommer et décrire les espèces inconnues, classifier l’ensemble selon les connaissances de son temps, étaient ses premiers objectifs. Donner à ses contemporains des documents faciles de compréhension et d’utilisation, afin de les initier à leur étude, fut le second grand volet de ses préoccupations. La botanique, l’horticulture, l’entomologie, les mollusques furent ses quatre pôles favoris. La Flore canadienne, le Verger canadien, la Petite Faune entomologique du Canada, les Mollusques de la province de Québec, quatre traités dans des domaines inexplorés avant lui, paraîtront successivement entre 1862 et 1891. Les huit tableaux qu’il se proposait de publier, en 1881, et que nous reproduisons dans ce Cahier, étaient une synthèse de ses études qui ont occupé les cinquante dernières années de sa vie de naturaliste et qu'il voulait offrir à son public. Ils démontrent l’imagination, la volonté et l’énergie que Provancher pouvait déployer pour inviter et persuader ses concitoyens à étudier les sciences. »

Pour répondre au souhait du Conseil d’Agriculture du Québec formulé au public, en 1872, afin d’obtenir un texte accessible aux cultivateurs, Léon Provancher rédige un Traité élémentaire d’Agriculture qu’il ne présentera pas et ne pourra publier pour des raisons financières. Il était bien qualifié pour rédiger un tel document, car il connaissait la classe agricole en tant que fils de cultivateur et pasteur de paroisses comme vicaire, de 1844 à 1848, et comme curé, de 1848 à 1869. De plus, il a fait progresser les connaissances utiles à la classe agricole par ses travaux scientifiques, depuis les années 1850. La flore du Québec, la culture des plantes et l’entomologie sont les disciplines dans lesquelles il s’est distingué. Pendant vingt-cinq ans, il se préoccupera de l’importance de la recherche en agriculture, de la création d’un musée agricole étatique et de l’éducation des cultivateurs. Il présente ses idées dans ses conférences et ses articles dans sa revue Le Naturaliste canadien. Son manuscrit, inédit à ce jour, fait l’objet de ce Cahier.